mardi 28 mars 2017

Les eaux de Mars (c’est de saison)

J’aime bien la peur, je trouve ça intéressant. 

Chögyam Trungpa en parle très bien et il dit entre autres ceci :
« La peur peut prendre bien des formes (…) [elle] se manifeste parfois sous forme d’agitation : nous gribouillons dans notre carnet, tambourinons avec nos doigts ou gigotons sur notre chaise. Nous avons l’impression de devoir remuer sans cesse, comme un moteur de voiture qui tourne.  Les pistons montent et descendent, montent et descendent et leur mouvement perpétuel nous rassure. (…) Nous disposons d’innombrables stratégies pour nous changer les idées et nous distraire de la peur.  Il y a des gens qui prennent des tranquillisants, d’autres qui font du yoga.  D’autres encore regardent la télévision, lisent une revue ou vont prendre un verre dans un bar. (…) Nous devons observer notre façon de nous mouvoir, de parler, de nous conduire ; nous devons voir comment nous nous rongeons les ongles, comment nous mettons parfois les mains dans les poches sans raison.  Petit à petit, nous comprendrons comment la peur s’exprime sous forme d’agitation.  Il est important de se rendre compte que la peur est toujours en train de rôder alentour, dans tout ce qu’on fait. (…) » 

Dans la pratique de la méditation, on a vraiment le temps et l’occasion de regarder notre peur de très près. La peur, l’angoisse, le stress, le doute… tout y passe et repasse en boucle.

Mais finalement, à force de fréquenter cette peur, on finit par faire la paix avec elle.  Et oui, on a presque tout le temps peur et on s’angoisse, bref on souffre. A force d’y porter attention, de la regarder de près, les yeux dans les yeux, de ne pas partir en courant face à elle, on finit par ne pas trouver ça très grave.  
Je dirais même qu’on la prend en affection cette brave peur, on peut lui faire des câlins ou des bisous. On peut être bienveillant envers cette compagne qui chemine à nos côtés.
Et tout d’un coup, tout s’ouvre.  
Les anges et la fée Clochette viennent nous visiter, la vie devient plus légère, on se prend moins au sérieux et on chante «Les eaux de Mars* »  à tue-tête sous la douche :

« Un pas, une pierre,
Un chemin qui chemine
Un reste de racine,
C'est un peu solitaire

C'est un éclat de verre,
C'est la vie, le soleil
C'est la mort, le sommeil,
C'est un piège entrouvert

Un arbre millénaire,
Un nœud dans le bois
C'est un chien qui aboie,
C'est un oiseau dans l'air

C'est un tronc qui pourrit,
C'est la neige qui fond
Le mystère profond,
La promesse de vie

C'est le souffle du vent
Au sommet des collines
C'est une vieille ruine,
Le vide et le néant

C'est la pie qui jacasse,
C'est l'averse qui verse
Des torrents d'allégresse,
Ce sont les eaux de Mars

C'est le pied qui avance
A pas sûr, à pas lent
C'est la main qui se tend,
C'est la pierre qu'on lance
(…)
C'est un oiseau dans l'air,
Un oiseau qui se pose
Le jardin qu'on arrose,
Une source d'eau claire
(…)
Un poisson, un geste,
C'est comme du vif argent
C'est tout ce qu'on attend,
C'est tout ce qui nous reste
(…)
C'est l'hiver qui s'efface,
La fin d'une saison
C'est la neige qui fond,
Ce sont les eaux de Mars

La promesse de vie,
Le mystère profond
Ce sont les eaux de Mars
Dans ton cœur tout au fond. »   


Anne Vignau
Saint-Gratien

*A l’origine une chanson brésilienne, Aguas de Março, écrite par Tom Jobim. Si vous souhaitez l’entendre, écoutez l’interprétation de Elis Regina et TomJobim. 

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