jeudi 16 juin 2016

Rester mort c'est trahir la vie

C'est dans Suppôts et Supplications qu'on peut trouver, entre autres pépites, ce beau diamant du lapidaire Artaud – le grand poète agacé :Rester mort c'est trahir la vie

Est-il besoin d'un commentaire ? Combien de minutes et d'heures restons-nous morts par jour ? Enterrés sous les tonnes de grabat de nos préjugés, étouffés sous les matelas confortables de nos absences, écrabouillés par les mécanismes de notre quotidien, écartelés entre nos pesanteurs et notre légèreté... 

Demandons-nous plutôt combien de temps sommes-nous vivants par jour...

Au moins une quarantaine de minutes de mon côté. Sur un coussin rouge, jambes croisées. A ne rien faire que vivre – ou plutôt apprendre à vivre – la vie telle qu'elle respire lorsqu'on se redresse un peu vers elle. D'ailleurs les chats ne s'y trompent pas, qui viennent tous les matins méditer avec moi. Eux qui vivent leur vie toute la journée savent reconnaître quand j'approche la mienne.
 
Nous discutons peu – ces félins et moi – de ces questions existentielles, mais d'une certaine façon, m'asseyant pour pratiquer, j'ai parfois le sentiment de leur acquiescement. Comme s'ils me disaient : « Tu vois quand tu veux, tu arrives à ne plus les faire passer au premier plan – tes sacro-saintes réactions qui t'empoisonnent l'existence. A te regarder, cela n'apparaît ni agréable, ni désagréable de méditer. C'est. Avant tout, avec tout, c'est faire le chat dans son existence. La meilleure manière d'apprendre à être vivant que je connaisse – foi de mistigri. Miaou ! »

Yves Dallavalle
Chapendu

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