mardi 18 octobre 2016

La tristesse, signe d'une grande santé ?

Il y a une dizaine d’années j’étais parti en vacances en famille un été. Nous avions confié notre maison à un couple de retraités pour qu’ils s’occupent des animaux domestiques. C’était l’occasion pour eux de découvrir une région qu’ils ne connaissaient pas tout en séjournant dans une maison confortable. 

A notre retour nous avions été très surpris de les retrouver très déprimés et pressés de partir. Ils n’avaient visiblement pas apprécié leur séjour et étaient à peine sortis de la maison pour visiter les alentours. Il leur tardait nous avaient-ils dit de retrouver l’association humanitaire en Afrique pour laquelle ils travaillaient. 

Je me souviens avoir pensé qu’ils avaient vraiment un problème psychologique pour être aussi tristes et ne pas être capables de s’adapter dans un contexte nouveau qui aurait pu être agréable et leur permettre de découvrir une nouvelle région. Leur cas était pour moi clair et je leurs aurais volontiers conseillé d’aller consulter un psychologue pour soigner leur dépression.

Quand je repense à eux aujourd’hui mon regard sur cet événement a changé. Je réalise que je les avais catalogués un peu vite, sans même les connaître. Peut-être se sentaient-ils appelés par une cause qui les dépassait et qui donnait une direction à leur vie, à tel point qu’une parenthèse de quelques jours dans un lieu sans rapport avec leur aspiration leur était apparue comme très futile ? 

Je me rends compte maintenant qu’une tristesse, voire une dépression n’est pas forcément le symptôme d’une maladie. Parfois même c’est le signe d’une grande santé. Vouloir s’adapter à toutes les situations pourrait revenir à l’extrême à accepter l’inacceptable. 

Je ne vois plus aujourd’hui mes états de tristesse si dramatiques qu’auparavant. La méditation n’a pas éliminé ces moments, même si elle m’a permis de ne pas m’y morfondre, voire de les apprivoiser. Je me méfie par ailleurs des approches psychologiques qui prétendent que ces états de tristesse sont pathologiques et cherchent à nous rendre adaptables à toutes les situations. 

Je ne sais pas au fond qui étaient ces personnes qui étaient venues passer des vacances dans ma maison, ni ce qu’elles sont devenues. 

L’idée même de vacances s’est modifiée depuis que je pratique la méditation et que je suis engagé dans notre École. Si passer des vacances signifie être ensemble, nourrir des liens ou s’assoir sur un coussin de méditation cela me va, mais ce qu’on entend en général aujourd’hui par vacances est souvent une sorte de parenthèse. On cherche à se divertir, à se dépayser, on souhaite des distractions, de la consommation culturelle, des aventures, comme pour donner du piquant à la vie, pour trancher par rapport à notre quotidien trop terne ou pour capitaliser des connaissances ou des expériences nouvelles.

Au fond, cette idée de vacances est passée pour moi au second plan par rapport au fait d’être au travail, de pratiquer la méditation, d’être engagé dans un chemin, de suivre une aspiration. 

Je veux croire que cette aspiration peut changer le monde. 

Xavier Ripoche
Paris

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